Le destin ressemble à ces nuits entières
oubliées dans l’encrier... Salah Al Hamdani
كلما تمرستَ بحلِ عقدُ الحياة
تساقطَ من حولكَ من يتصنعُها... صلاح الحمداني
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Le Balayeur du désert
Recueil en deux parties, traduction de l’arabe (Irak) par l’auteur
et Isabelle Lagny, pour la première partie.
Deuxième partie écrit en français
Editions Bruno Doucey 2010
Miroir inversé
Ma nuit est de sable sur une table de verre
J’ai sur moi l’odeur de l’exil
ma demeure d’argile est bien-là
sans jardin, sans forêt ni palmier
mon ciel est un fleuve inversé
et mes mots naviguent
au-dessus d’un pays lointain
où les hommes cherchent la direction du jour
Je courais pendant toutes ces nuits
jusqu’à museler les sentiments et presser le nuage
Cela apaisa mon esprit
Ma vie, béante,
livrée aux vagues sans retour encore ?
Et ta vie à toi
de quoi rêvait-elle ?
Une halte
Ce rêve à retardement
en longue errance
avant de s’échapper de l’abîme
comme incertitude d’un ultime retour
Café tiède
moulin à vent
jouet pour des soldats vaincus
et une fillette qui court vers je ne sais quoi
dans une chute de lumière
tranchée par un troupeau
Tayhe, le chien,
s’éloigne en tirant son destin
alors que personne ne l’attend
excepté ce soupir noyé par l’horizon
Après le retour à Bagdad
J’ai dû renoncer au rêve pour m’approcher de toi. Ce rêve dont j’avais pris l’habitude d’entretenir les étrangers jusqu’à devenir la proie de moi-même quand les instants se rassasient de souvenirs.
J’arrange mes sentiments comme on le fait dans un lieu familier délaissé. Je règle mes comptes avec les années de regrets. J’adresse des reproches au destin. J’ouvre les vantaux du fleuve pour entendre sa parole. Oui, j’ai souhaité revenir près de toi, lourd de toute mon existence comme un croyant qui implore vainement. Un croyant qui avance avec sur sa langue, l’alphabet du voyage, les accents de son corps, et prend de la hauteur dès qu’il s’approche des tombes.
Mais au milieu du chemin,
que faire de moi-même
et de cette douleur des jours ?
Je ne laisse s’échapper de ma pensée que la nostalgie et l’espoir qu’enfin je ferai corps avec ces lieux. Lieux imaginés, lieux perdus, comme cet arbre à l’ombre duquel à midi, jadis, je somnolais pour grandir.