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Poèmes extraits du recueil "Saisons d'argile" de Salah Al Hamdani. 

Editions Al Manar, Paris, 2011 (Poèmes écrits en français)

Anthologie de la violence

 

En peu de temps

la main qui tisse une lumière pour la terre

cette même main

doit aussi prendre la hache

pour renverser le pouvoir illégitime

de toutes les tyrannies

 

Il y a eu la naissance des choses

le temps du partage

et le retard à rendre visite à sa propre dépouille

 

Sans délai il faut initier le mouvement

mettre son passé sous son bras

Bataille contre la gravité, trouble de la vision

plus vite encore

aller quelque part

après minuit

 

Et puis

saisi par un temps, une perte ininterrompue

se laisser glisser

comme un nuage au-dessus d’une table à l’envers

 

Parce qu’il suffit de se déplacer

avec la pensée matinale d’un chien

pour se retrouver sain et sauf

malgré sa propre adversité

 

Etre embarqué

 

 

à Albert Camus

 

Écrire avec le souffle de la patrie

avec l’argile du palmier libéré

avec les racines de tes pas

                 dans les charniers des pauvres

 

Écrire sur le vent

qui donne naissance aux hommes noyés

 

Écrire sur les épaules du fleuve

et aussi sur le voyage de nulle part

à l’instant qui limite le jour

 

Écrire comme le prisonnier du miroir

 

Écrire pour calmer l’univers dans la tête du mendiant

pour extraire la sève des souvenirs

pour le vol des migrateurs sans escale

 

Écrire pour éclairer une forêt de pins dévastée

et élargir la fosse d’un tyran

 

Ainsi suis-je embarqué sur le corps

de la tempête des hommes

 

 

Apprenti de la parole

 

 

Le rêve le plus abouti

n’est pas celui qui vient du royaume de l’inconscient

 

Regarde le dehors

le jardin dans la solitude du silence

souriant à l’impatience des amants

qui mêlent leurs lèvres sans un mot

dans l’incendie d’une étreinte

 

Ainsi le miroir se plaît en toi

alors que mon chagrin recommence

 

Plus tard, après la pluie

ta nuit est rentrée

et timidement le jour est apparu

alors que ton regard fixait toujours le bateau en papier

 

Toi, gamin issu de l’argile

qui apprend au désert la parole

l’infini sous les pieds

dis-moi pourquoi soudain je pense aux fusillés

et comment rattraper l’élan du hasard

et écrire sur les hommes ?

 

Que faire, dis, de ce chantier de songes défrichés

de ce manoir qui tournoie contre le vent

et de l’origine de la balade sur le quai triste ?

 

Le voleur de visage

est comme Adam au clair de lune

à la lueur de cette perle

comme un sortilège de l’écriture

un triomphe du printemps

 

De haut en bas

je suis le veilleur de l’aube

le moulin de la perte

 

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